La psychologie sociale est une discipline qui étudie les interactions entre l’individu et la société. À la croisée de la psychologie et de la sociologie, elle cherche à comprendre comment les comportements, les attitudes, les représentations et les identités se construisent dans des contextes sociaux spécifiques.

Au Maroc, cette discipline connaît un développement progressif, porté par une génération de chercheurs engagés dans l’analyse des dynamiques psychosociales propres au contexte marocain. Cela accompagne l’intérêt manifesté à plusieurs reprises par Sa Majesté le Roi Mohammed VI pour le développement de la jeunesse et de la société, à travers des discours et des politiques visant à favoriser les capitaux humains dans différents contextes.

1. Genèse et développement de la psychologie sociale au Maroc

La psychologie sociale a été introduite au Maroc dans les années 1980, grâce notamment au travaux pionniers du professeur El Mostafa Haddiya, considéré comme le père fondateur de la discipline au Maroc. Après son retour en France, il revient au Maroc avec une vision ambitieuse : adapter les outils conceptuels et méthodologiques de la psychologie sociale aux particularité de la société marocaines.

En revanche plusieurs chercheurs tels que Dr. Hamid Boudar, Dr. Ahmed El Bouazzaoui, Dr. Rachid El Ganouni, Dr Mustapha Chagdali, Dr. Mouna Bakouri , Dr. Laila Benjlloun ... ont contribué à structurer ce champ à travers l’enseignement, la recherche et les publications.

2. Approche théorique et méthodologique

La psychologie sociale marocaine repose sur une double orientation :

Une ouverture aux apports universels de la discipline (Lewin, Tajfel, Bandura, Moscovici, etc.)

Une adaptation aux spécificités culturelles, historiques et sociales du Maroc

Dr. El Mostafa Haddiya insiste sur l'importance de limiter la généralisation des résultats, en soulignant que toute recherche est située dans un temps, un lieu et un cadre culturel déterminé. Le terrain, l’observation, l’entretien, l’analyse des représentations sociales sont les outils privilégiés pour comprendre les caractéristiques de la société marocaine.

3. Axes de recherche majeurs

Les travaux en psychologie sociale au Maroc s’articulent autour de problématiques centrales telles que :

La socialisation et la formation de l’identité chez les enfants et les jeunes

L’impact des inégalités socioéconomiques sur le parcours scolaire

Les formes de violence symbolique, d’exclusion et de stigmatisation

Le rôle des représentations sociales dans la perception de l’Autre et de soi

Les effets des mutations culturelles sur les dynamiques communautaires.

4. Domaines d’application

La psychologie sociale s'applique à plusieurs secteurs :

Éducation : compréhension des dynamiques de classe, accompagnement psychopédagogique, lutte contre l’échec scolaire

Santé mentale : soutien aux populations vulnérables, enfants en situation de handicap, Femme, prévention et intervention psychosociale.

Gestion des organisations : management d’entreprise, coordination des équipes, optimisation des RH et développement stratégique

Communication et médias : analyse des effets sociaux des campagnes médiatiques

Politiques publiques : étude de l’impact des décisions sur les groupes sociaux, promotion de la cohésion

5. Enjeux et défis actuels

Malgré l’évolution notable, la psychologie sociale au Maroc rencontre plusieurs obstacles :

• Faible reconnaissance institutionnelle du métier de psychologue social

• Manque de financement pour la recherche et les publications

• Accès limité aux formations de master et doctorat

• Nécessité de créer des passerelles entre recherche et action sociale

Face à cela, des appels ont été lancés, notamment par la Association Marocaine des étudiants et des étudiants-chercheurs en psychologie sociale, dans le but de renforcer ce parcoure académique et l’intégration professionnelle des diplômés.

La psychologie sociale constitue aujourd’hui un domaine essentiel pour analyser les transformations profondes de la société marocaine. Elle permet de mieux comprendre les tensions identitaires, les mutations des valeurs, les logiques d’exclusion ou d’intégration. Plus qu’une discipline académique, elle est un outil d’émancipation, de diagnostic et d’action au service d’une société plus consciente, plus équitable et plus solidaire.